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Tuesday, September 18, 2012

Cuba, Renaissance de la religion

Y aurait-il une liberté de foi sur l'île ?
 
Il y a quelque jours, une femme du Comité de Défense de la Révolution frappa à ma porte. J'ai tout d'abord pensé qu'elle s'était trompée, ou qu'elle venait chez nous pour nous demander des comptes, cela faisant bientôt 10 ans que nous ne militions plus pour le CDR.
 
 
Mais cette femme ne s'adressa pas à nous sur un ton martial, comme celui normalement employé lorsqu'on nous impose d'assister à une réunion. Elle était venue pour tout autre chose.
Elle sortit de son sac une petite brochure bleue, et nous annonça que le samedi 8 septembre aurait lieu, dans plusieurs églises de la Havane, une série de processions et de messes en l'honneur de la Vierge de la Charité del Cobre.
 
J'ai encore du mal à me remettre d'un tel retournement de situation.
Il y a encore quelques années, cette même femme était une fervente athée pour qui la religion était partie prenante de la "contre-révolution". Et voilà qu'aujourd'hui, elle nous invite à un pèlerinage catholique!
Je lui ai alors demandé si elle nous avait été envoyée par le CDR. A mon plus grand étonnement, elle me lança:
 
"Non, ça, c'est mon idée".
 
Incroyable. La voisine, qui, depuis son balcon, surveillait il n'y a pas si longtemps encore les moindres allées et venues des habitants de l'immeuble, guettant, un sac, un accompagnant ou encore un horaire hors du commun, se lance à présent dans la prise d'initiatives respectables.
Au final, ce contraste me plaît bien. Je préfère de loin ce nouveau mode de vie à l'ancien. Mais je ne peux pour autant m'empêcher de me demander:
Mais que s'est-il donc passé?
Tout d'abord, en cette année 2012, nous célébrons les 400 ans de l'apparition de la Vierge de la Charité, notre patronne. Cachita, comme nous la nommons populairement, est très vénérée aux quatre coins de l'île, et a même transcendé la sphère religieuse jusqu'à s'ériger comme emblème du typiquement Cubain.
Elle est également ancrée dans la santería à travers la déité connue telle Oshún. On l'associe à une série d'attributs provenant de son image catholique: son manteau doré, les trois hommes placés à ses côtés, l'enfant qu'elle porte contre elle. Mais elle est également attachée à des éléments comme la flatterie, la féminité, l'amour et les denses sensuelles, caractéristiques directement issues de la religion yoruba.
 
Dans une île épicée, notre patronne ne pourrait pas être amère.
L'histoire simple de la Vierge de la Charité remonte aux alentours du 17e siècle, dans la baie de Nipe, à l'Est du pays. Deux hommes et un adolescent appelés Juan (les trois Juanes) l'ont vu flotter sur l'eau. Ainsi, Cachita, cette rescapée des vagues sauvée par ces bras d'hommes, est devenue María, guajira d'un village, qui des siècles plus tard se lancera à corps perdu dans le détroit de Floride sur des radeaux, des portes converties en embarcations et des bennes qui arrivent tant bien que mal à flotter.
La Vierge Mambisa a cotoyé ceux qui ont lutté, la machette dans la main, pour l'indépendance cubaine face à l'impérialiste couronne espagnole. Aujourd'hui, elle décore les autels de compatriotes éparpillés sur le globe terrestre. Elle a son ermitage à Miami, comme elle a son sanctuaire à Santiago de Cuba; et on peut même la voir dans des appartements à Madrid.
Cachita fut notre première balsera, notre première navigatrice dépourvue, à la grande différence qu'elle ne partait pas, elle, elle venait, et elle ne voulait pas voir ailleurs, elle, elle voulait rester ici pour toujours.
Dans le salon d'entrée de cette Église -La Chapelle des Miracles-, on peut voir des mèches de cheveux laissées par des filles fraîchement mariées et des chaussons de bébés usés mais encore utilisables.
 
2012-09-17-800pxM2672.pngOn y voit aussi des brassards du Mouvement du 26 juillet, portés par les rebelles qui se sont repentis.
Dans un coin, une pancarte nous rappelle les dissidents incarcérés pendant le Printemps Noir de 2003. Il n'y a que sous le manteau de Cachita que peut cohabiter une telle pluralité.
Le Sanctuaire del Cobre est rempli toute la journée, autant de croyants ayant eu la foi toute leur vie que d'autres sachant à peine faire le bénédicité.
Beaucoup d'entre ceux qui se proclamaient anti-religieux au temps où posséder un crucifix était encore un péché idéologique se définissent aujourd'hui comme catholiques, santeros, juifs, musulmans ou témoins de Jéhova. Le déblocage cubain sur le sujet religieux se glisse en un sentiment très particulier et inattendu; on part de l'agnosticisme pour atteindre la foi en passant par le doute au crédo.
Les crucifix ne se cachent plus sous les chemises et les autels et leurs saints prennent l'air, à la vue des témoins, et ceci dans des milliers de maisons. Nous est revenue l'habitude de baptiser les enfants alors que les générations précédentes en étaient privées.
Les mariages à l'Église reviennent à la mode et on assiste même dans les hôpitaux à des extrêmes-onctions. Les classes de catéchisme sont pleines d'enfants dont les propres parents ont appris à l'école que "la religion est l'opium du peuple".
 
L'Histoire nationale semble avoir clôturé le chapitre sur les fusils pour ouvrir celui sur les rosaires.
Mais il ne s'agit pas uniquement de la religion; c'est aussi l'Eglise en tant qu'institution qui a gagné du terrain dans notre société ces dernières années. Elle a obtenu, entre autres, la possibilité d'ouvrir un nouveau séminaire de formation des prêtres.
Les messes catholiques sont diffusées à la télévision nationale à des heures bien précises, et même le discours politique s'est séparé de ses slogans anti-religieux.
Je constate également ces changements à mon échelle: ma voisine fondamentaliste, militante du Parti Communiste et membre active des CDR, a retrouvé le chemin de la foi.
Le CDR ne vient plus nous chercher pour faire du bénévolat, mais pour aller à la messe; on ne m'appelle plus "camarade" mais "sœur". Pour couronner le tout, la photo de Fidel Castro en uniforme qui se tenait dans la salle à manger de ma chère voisine a laissé sa place à une image de Cachita vêtue de son costume doré avec, à ses pieds, trois petits hommes sur un radeau qui la regardent tout le temps. Source 

COMMENTAIRE :
C'est à peine si j'ai touché le texte.

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