Rapport de sécurité de Munich : l’apocalypse est proche.
Date du Rapport : 17 février 2017
Le Rapport de sécurité de Munich de 2017 aboie la fin du
monde.
Ce qui révèle du jamais vu, selon John Wight1, le libéralisme occidental
(pas l’Occident), qui a mené aux catastrophes dans plusieurs régions du monde,
est maintenant en crise lui-même.
© MSC/Koch/securityconference.de
La réunion de la Conférence sur la sécurité à Munich, Allemagne
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À l'aube
de la Conférence sur la sécurité à Munich de 20172,
les organisateurs ont publié un rapport avec le sous-titre Post-vérité,
post-Occident, post-ordre ? La question répond à elle-même,
mais pas pour des raisons que les libéraux occidentaux accepteraient.
Par souci d’exactitude, soyons clairs : ce n’est pas
l’Occident, c’est le libéralisme occidental qui est en crise. Ce sont deux
entités différentes, et en effet, comme les événements l’ont montré et le
prouvent toujours, elles sont complètement antithétiques.
Le premier paragraphe du rapport de la conférence de
Munich sur la sécurité, se lit comme si la fin du monde était à nos portes.
« Le monde fait face à un moment non libéral. Dans
l’ensemble de l’Occident et au-delà, les forces intolérantes gagnent du
terrain. De l’intérieur, les sociétés occidentales sont troublées par
l’émergence de mouvements populistes qui s’opposent aux éléments critiques du
statu quo libéral-démocratique. Du dehors, les sociétés occidentales sont
contestées par des régimes non libéraux qui essaient de mettre en doute la
démocratie libérale et d’affaiblir l’ordre international. Et les Etats occidentaux eux-mêmes semblent peu
disposés et incapables de surmonter efficacement les plus grandes crises de
sécurité – la Syrie en étant le premier exemple3. »
« Essayez d’expliquer au peuple de l’Afghanistan, de l’Irak, de la Libye, de la Syrie, de l’Afrique, de l’Amérique latine, qui ont vu leurs pays et sociétés être détruits au nom de la démocratie libérale, ce « moment non libéral » qu’ils doivent redouter. »
Cette déclaration sous-entend la supposition que le
libéralisme, ou les valeurs libérales, devraient être considérées comme
sacro-saintes, la condition sine qua non de la vertu culturelle,
politique, économique et morale, et comme ces valeurs selon lesquelles tout
pays, toute société et tous les peuples doivent exister, indépendamment des
spécificités culturelles, régionales ou historiques.
C’est là le problème. Malgré le carnage, le chaos,
l’instabilité, le conflit interminable, l’effondrement de la société, et les
bouleversements économiques qui ont été forgés ces derniers temps au nom de ces
mêmes valeurs libérales « intouchables » et de la démocratie libérale, ses
défenseurs refusent toujours de voir le réalité. Essayez d’expliquer au peuple de l’Afghanistan4,
de l’Irak, de la Libye, de la Syrie, de l’Afrique, de l’Amérique latine, qui
ont vu leurs pays et sociétés être détruits au nom de la démocratie libérale,
ce « moment non libéral » qu’ils doivent redouter. Tentez d’en raconter
aussi au nombre honteusement croissant de victimes de la pauvreté, du manque
d’éducation, des logements insalubres, des soins de santé de mauvaise qualité
ou inexistants dans ces pays occidentaux, où les valeurs libérales prédominent.
Et quand
il s’agit de la Syrie5,
alléguée dans le rapport en tant que preuve d’une « crise de sécurité » que « les
Etats occidentaux semblent peu disposés et incapables d’aborder efficacement »,
ces gens n’ont-ils pas de honte ? Cette sorte de barbarisme bestial
et brutal qui a englouti la Syrie au cours des six dernières années, est le
fruit d’une déstabilisation de la région causée par les guerres du
« 11-Septembre » – une série de guerres et de conflits qu’ils ont déclenchés et
qui ont éclaté à la suite de l’atrocité terroriste planifiée et réalisée par
Al-Qaïda contre les Etats-Unis en 2001.
« Leur détermination à exploiter l’attentat du 11-Septembre comme prétexte pour un changement de régime au Moyen-Orient a ouvert les portes de l’enfer »
Ce qui
doit être considéré comme l’ironie de notre temps, Washington et ses alliés ont
plutôt réussi à assurer la croissance et l’intensification d’une menace
terroriste6 et de l’idéologie d’Al-Qaïda, au lieu de le détruire. Dit franchement, leur
détermination à exploiter l’attentat du 11-Septembre comme prétexte pour un
changement de régime au Moyen-Orient a ouvert les portes de l’enfer, d’où le
monstre du djihadisme salafiste a émergé, déterminé au génocide, à la
mort et à la destruction7 comme une fin en soi. Tout le monde peut en voir les graves conséquences
sous la forme de la crise des réfugiés, qui est parallèle à celle qui a eu lieu
au début de la Seconde Guerre mondiale, sous la forme du sectarisme religieux
et de l’extrémisme, de la prolifération du terrorisme, à la fois régional et
international, et de la souffrance humaine sur une échelle, en comparaison à
laquelle le terme « civilisation occidentale » est dérisoire.
Plus loin dans ce rapport, on tombe sur la chose suivante
:
« Les
commentaires de Donald Trump prétendant que l’OTAN est « obsolète »8 ont provoqué une grande incertitude chez les alliés des Etats-Unis, surtout en
Europe centrale et orientale. L’Union européenne est sous pression
aussi, car elle doit faire face au Brexit, à une vague populiste, à la crise
des réfugiés et à une rechute éventuelle de la crise de l’euro, aux attaques
djihadistes, à la Russie révisionniste. »
Encore une fois, nous voyons la preuve d’une disjonction
intellectuelle entre les convictions profondes du champion de l’hégémonie
libérale et la réalité. L’OTAN n’est pas une force pour la paix universelle, ni
pour la sécurité, ni la démocratie, ni la liberté, comme ses adhérents le
proclament. En réalité, c’est une alliance militaire destinée à répandre la
puissance impérialiste occidentale, celle qui a un héritage funeste de
changement de régime – par exemple, en ex-Yougoslavie et en Libye. C’est un
rudiment de la guerre froide qui a été ressuscité et qui a gagné en importance
ces dernières années, en concordance avec le retour à un paradigme de la guerre
froide – adopté pour détourner l’attention des épaves politiques, économiques
et géopolitiques, que les valeurs et les normes libérales démocratiques ont
laissées.
Autrement
dit, la Russie joue le rôle d’un épouvantail commode9 contre lequel les peuples des Etats-Unis et de l’Europe occidentale sont
encouragés à se réunir, et qui est présenté comme une menace pour leur sécurité
et leurs intérêts nationaux. Comme George Orwell l'a écrit, « La guerre
c’est la paix. La liberté c’est l’esclavage. L’ignorance c’est une force ».
« Remplacez « révisionniste » avec « forte », et vous arriverez au vrai problème que les impérialistes libéraux occidentaux ont avec la Russie en 2017 »
Aucune personne raisonnable ne s’oppose à la conception
d'une Europe unie, stable et sûre. Comment le pourraient-ils, si une telle
Europe est dans l’intérêt de tout le monde ? Mais le principal obstacle qui
empêche de parvenir à cette unité, cette stabilité et cette sécurité c’est
l’idée que la Russie ne peut et ne doit pas faire partie de la solution à cet
égard, et qu’elle doit être considérée comme une partie du problème.
Ce qu’ils décrivent comme la « Russie révisionniste » est
vraiment un code pour la Russie qui refuse de se mettre à genoux devant
l’impérialisme, la domination et l’hégémonie de l’Occident. Remplacez
« révisionniste » avec « forte », et vous arriverez au vrai problème que les
impérialistes libéraux occidentaux ont avec la Russie en 2017. Ils préfèrent de
loin le pays qui a été ravagé et décimé par les fondamentalistes du
libre-échange dans les années 1990, et exploiter le chaos et le choc qui ont
suivi l’effondrement de l’URSS, pour faire une expérience de masse
au désespoir humain sur l’ensemble de la société.
La sortie de la Russie de cette sombre décennie c’est
quelque chose qui n’a jamais été pardonné par des gens comme Javier Solana,
David Miliband et George Soros, qui sont tous membres du Conseil consultatif de
la Conférence sur la sécurité de Munich.
Le contenu du rapport de 2017 confirme tout simplement
qu’il n’y a rien de plus intolérant qu’un libéral qui voit le monde comme un
échiquier géant, sur lequel les Etats, les gouvernements et des peuples entiers
sont de simples pions qui doivent être déplacés selon son désir. Source
NOTES :
1. John Wight écrit pour de nombreux journaux et sites
web américains et anglais, notamment The Independent, The Morning
Star, Huffington Post, Counterpunch, London Progressive Journal et Foreign
Policy. Il est aussi un commentateur régulier sur RT et BBC Radio. John Wight a
été l'organisateur du mouvement pacifiste américain dans la période qui a suivi
les attaques terroristes du 11-Septembre.