Les affrontements interconfessionnels qui sévissent au Myanmar font écho au
problème des réfugiés Rohingyas.
Depuis vendredi des violences meurtrières entre
bouddhistes et musulmans frappent l’ouest de la Birmanie. Un haut responsable
des Nations unies est arrivé aujourd’hui : Vijay Nambiar, conseiller spécial pour ce pays du secrétaire
général de l'ONU Ban Ki-moon. «Nous sommes ici pour observer et évaluer comment
continuer à apporter notre soutien», a indiqué à l'AFP Ashok Nigam, le
responsable de l'ONU sur place. L'émissaire est immédiatement reparti pour le
nord de l'Etat à Maungdaw, à la frontière avec le Bangladesh.
C'est dans cette ville peuplée par
la minorité musulmane apatride des Rohingyas, qu’ont éclaté les violences. Elles
ont fait suite au lynchage de dix musulmans, le 3 juin dans le sud de l'Etat,
par une foule de bouddhistes en colère qui voulait venger le viol et le meurtre
d'une femme. Les affrontements, qui se sont propagés à Sittwe, capitale de
l'État d'Arakan, ont fait environ 25 morts et 41 blessés depuis vendredi, selon
un responsable gouvernemental birman. La presse officielle fait état de quelque
1 600 maisons brûlées. «Des bandes rivales armées de longs couteaux et de
bambous affûtés se livrent à des chasses à l'homme et incendient des centaines
de maisons», témoigne Florence Compain, correspondante pour l’Asie du Sud-Est
au journal Le Figaro.
Les musulmans sont en ligne de mire. Ils représentent 4 %
de la population — contre 89 % de bouddhistes — et sont confinés dans le nord du
pays. L'ONU les considère comme l’une des minorités les plus persécutées de la
planète. «Ils sont systématiquement rejetés, stigmatisés et violentés,
renchérit Florance Compain. Leur drame est d'avoir servi de supplétifs à l'armée
britannique lors de sa conquête de la Birmanie au XIXe siècle.»
Considérés comme des traîtres, ils sont tyrannisés depuis
l'indépendance en 1948. Des campagnes de terreur voire d’éradication sont
régulièrement lancées à leur encontre. Le reste du temps, ils subissent un
arsenal législatif pour le moins discriminatoire : travail forcé, confiscation
de terres, interdiction de se marier ou de se déplacer sans les accords de
l’autorité… En 1982 surtout, une loi les dépouille de leur nationalité et en
fait des étrangers dans leur propre pays. Ils réclament depuis longtemps d'être
considérés comme un groupe ethnique birman et de disposer d'une citoyenneté
pleine et entière, mais le gouvernement les considère comme des immigrants
illégaux.
Ces derniers jours, témoignent les
journalistes de Reuters à Sittwe, Danielle Rouquié et Bertrand Boucey, les
Rohingyas ont été qualifiés d' «envahisseurs» ou de «terroristes» par des
Birmans qui utilisent leur toute nouvelle liberté d'expression et un accès
facilité à internet pour exprimer leur colère sur les réseaux sociaux.
«Les dernières convulsions dans
l'Arakan sont à première vue engendrées spontanément par les haines religieuses
et ethniques, analyse Florence Compain. Mais elles pourraient aussi être
orchestrées par le régime birman pour forcer la figure de proue de l'opposition,
Aung San Suu Kyi, à faire des déclarations impopulaires, comme un appel au calme
et à la sympathie envers cette minorité que l'opinion birmane tient en piètre
estime.» De fait, si la chef de l’opposition birmane s’est inquiétée mercredi
du sort des réfugiés birmans en Thaïlande, elle n’avait toujours pas exprimé une
position en ce qui concerne les Rohingyas. par Fabien Trécourt Source
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