Oui, répond la professeure Véronique Margron 
Véronique Margron est dominicaine et professeur de théologie 
morale à la Faculté de théologie de l’Université catholique de l'Ouest dont elle 
a aussi été le doyen de 2005 à 2010. Chroniqueuse à La Vie, elle travaille plus 
particulièrement les grandes interrogations de nos sociétés : la bioéthique, la 
souffrance, la solitude. 
Revenant de deux semaines à l’est de la RDCongo, dans le sud Kivu, où les 
exactions sont quotidiennes, où des femmes et des enfants sont martyrisés, je 
suis hantée par des visages d’infinie détresse et par d’autres de tant de 
lassitude de combattre à main nue un mal qui ne veut désarmer. 
J'étais avec un groupe oecuménique composé essentiellement 
d'acteurs très engagés sur le terrain: médecin, psychologues, écoutants, 
religieux. Nous sommes allés rencontrer des responsables de centre d'accueil des 
femmes victimes de barbaries sexuelles et des médecins dans leurs hôpitaux, 
faisant l'impossible pour leur rendre un peu de vie. Impossible de raconter ces 
tortures. 20 ans que des victimes arrivent encore et encore. 20 ans aussi de 
misère pour toute une population qui voit sa terre pillée. 
Oui il faut prier, supplier et supplier encore. Oui il faut 
croire, de la force du désespoir parfois - comme en tant de psaumes - en la 
puissance infinie de la plainte qui s’adresse au Dieu de bonté, de paix, de 
justice. S’il importe de prier ensemble c’est pour ce qui détruit l’humain, qui 
tue son espérance et son avenir. 
La prière est-elle politique ? Oui je le crois. Non pour des 
enjeux partisans, mais pour ce qui blesse la dignité fondamentale. Là où l’homme 
se fait plus qu’un loup pour l’autre, mais un sadique. Je pense spécialement à 
ces moniales cisterciennes, du monastère de la Clarté Dieu, près de Bukavu, qui 
ont vu une de leur sœur se faire assassiner devant le monastère. Et qui supplie 
pour les femmes, pour toutes les victimes. Qui ne baissent pas les yeux et 
gardent le bras levé comme Moïse, pour intercéder encore et encore pour que cela 
cesse.
À nous de les suivre, d’élever notre prière comme notre âme, 
afin que Dieu, qui peut descendre aux enfers, fasse se retourner les cœurs des 
bourreaux et nous supplie à son tour de prendre nos responsabilités de femmes et 
d’hommes. Car la barbarie qui se vit là-bas se déroule aussi bien ailleurs dans 
le monde, parfois à nos portes. Que nous voulions ou non nous partageons le seul 
et unique même bateau de l’humanité. C’est alors de notre propre cœur dont il 
est aussi question. 
Comment croire au Dieu de bonté au coeur d'un tel mal 
intentionnel ? Mais surtout comment croire encore en l'homme? Où est la 
communauté internationale pour faire en sorte que cela s'arrête enfin? Où est la 
société civile? La nôtre ? Et où est l'Eglise du Christ qui peine à dénoncer 
clairement ces abominations et les exclusions par leur mari et par les 
communautés dont ces femmes sont par dessus le marché victimes. 
Seuls ces femmes et ces hommes qui se battent désarmés, mais sans relâche, 
contre cette barbarie, fatigués mais toujours présents, sont le signe de 
l'espérance. Merci de supplier notre Dieu. Et de supplier les humains que nous sommes de 
quitter toutes brutalités. Prier, supplier, pour devenir des femmes et des hommes dignes du nom de Dieu. par 

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