La place de Dieu et de la religion dans le concert des nations africaines dites indépendantes d’après la vision de l’abbé Fulbert Youlou
L’abbé Fulbert YOULOU est un des rares hommes politiques africains dont la vision était quelque peu apocalyptique.
De confession chrétienne mais toutefois traditionnaliste et fort attaché aux principes et usages de l’Afrique précoloniale, l’abbé Fulbert YOULOU, clamera sans cesse sa foi en Dieu et son sentiment anti-communiste. Anti-communiste et je le serai toute ma vie répétait-il le plus souvent. Il ne croyait nullement aux mouvements dits révolutionnaires qu’il qualifiait de trop violents pour l’Afrique avec leur incapacité à pouvoir transformer en bien la vie des citoyens Congolais ou Africains.
D’après l’analyse politique de l’abbé Fulbert YOULOU, le socialisme africain ne pouvait réussir nulle part, car il ne correspond pas à la nature africaine. Chercher à vouloir résoudre les problèmes africains en fonction des concepts occidentaux socialo-communistes était selon le père-abbé, l’expression même d’une pensée humaniste, généreuse et naïve oubliant par exemple qu’au Kasaï (Congo démocratique) le paysan est encore comme l’homme des premiers âges et que pour lui, la récolte du manioc a plus d’importance que «l’aliénation sociale» chère à MARX ou le socialisme scientifique cher à K’KRUMAH (Abbé Fulbert YOULOU in «J’accuse la Chine» aux éditions la table ronde 1966 P.36.)
L’abbé Fulbert YOULOU sera cependant favorable à une franche collaboration basée sur des principes de justice sociale et d’équité entre l’Occident chrétien et l’Afrique noire nouvellement indépendante. Cette Afrique noire désireuse ou soucieuse de vouloir affirmer sa vocation, sa culture, ses coutumes et sa fécondité d’invention (Rudy Mbemba-Dya-Bô-Benazo-Mbanzulu in «Plaidoirie pour l’abbé Fulbert YOULOU» aux éditions l’Harmattan 2009 P.34.).
Discours du 24 novembre 1959 qui conduit le Congo à l'indépendance
Sur la question d’indépendance du Congo-Brazzaville, l’abbé Louis BADILA, tout comme l’abbé Fulbert YOULOU y posera judicieusement des limites en déclarant solennellement que : «Mais la souveraineté internationale à laquelle va accéder sous peu notre Congo, si elle est un droit réel, n’est cependant pas un droit absolu, et partant, ne doit donner lieu aux abus et excès. Le principe des nationalités est limité par le bien commun de la collectivité et de l’humanité toute entière. Le système du droit des nationalités formulé d’une manière absolue risque d’aboutir à de tristes conséquences. Les Etats comme les individus sont soumis à la même loi de charité contenue dans l’Evangile. Et c’est ici que se fonde l’intervention de l’Eglise en matière politique, non pas en des questions techniques pour lesquelles elle n’a ni mission ni compétence, mais celles qui engagent la foi et les mœurs. Le devoir de l’Eglise est d’interpréter les droits de Dieu et de veiller à leur sauvegarde en toute activité soit d’ordre politique, social, économique ou religieux. Je m’explique : l’Eglise n’a pas à minimiser l’autonomie et les droits de l’Etat, société parfaite en son ordre, mais bien à assurer la finalité dernière, à savoir le service de la personne humaine créée pour une destinée précise : la gloire de Dieu.» (Abbé Adolphe TSIAKAKA in «L’Abbé Fulbert YOULOU la mémoire oubliée du Congo-Brazzaville.» Auteur autoédité 2009 P.109.).
En tout état de cause pour le youlisme : «La distinction entre l’Eglise, société spirituelle, et l’Etat, société temporelle, et la liaison nécessaire qui doit exister entre ces deux ordres, est bien énoncée par le célèbre : «Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César».
Les conséquences sont donc les suivantes : autonomie de l’Etat dans son ordre, mais autonomie limitée par les droits de Dieu et de l’homme, neutralité de l’Eglise dans les questions de partis ou de régimes, interdiction d’inféoder l’Eglise à une nation.» (Abbé Adolphe TSIAKAKA ibidem).
C’est ni plus ni moins une affirmation du principe même de laïcité qui, en l’espèce est finement et habilement énoncé par le youlisme en prônant à la fois la séparation de l’Eglise et de l’Etat tout en définissant les prérogatives de chacun des deux ordres qui, au final doivent concourir à la promotion du bien-être des citoyens.
Si donc l’Eglise intervient, c’est, d’après le youlisme, pour rendre meilleurs et plus heureux les hommes, pour tourner vers Dieu et les aider à réaliser leur destinée. L’Eglise intervient, conclut-il, pour rappeler les droits et les devoirs des individus et des collectivités. (Abbé Adolphe TSIAKAKA ibidem).
Cependant le principe de laïcité tel qu’il est défini par l’abbé Fulbert YOULOU répond dans une certaine mesure aux croyances de l’Homme africain qui est naturellement croyant et fort attaché à ses coutumes et terres de ses ancêtres.
Aussi, selon le youlisme, «On ne saurait éliminer de la vie politique et sociale la religion sans glisser à l’anarchie. Mon cœur de prêtre de Congolais ne saurait supporter de voir le laïcisme s’installer dans notre Congo. Le laïcisme, c’est la négation d’un Dieu Maître du monde. Supprimer ? Mais alors sur quelle réalité allez-vous asseoir la notion de droit, de justice et de liberté. S’il n’y a pas d’Absolu ? Comment admettre un absolu dans l’homme. Il est donc du devoir de notre Etat de reconnaître sur lui la souveraineté absolue de Dieu, car : «Qui s’appuie sur Yahvé ressemble au Mont Sion : Rien ne l’ébranle, il est stable pour toujours». (Ps. 121, 1) (Abbé Adolphe TSIAKAKA P.110.). (*)
Quoique l’argumentation soit chrétienne, n’empêche qu’elle est en parfaite harmonie avec la philosophie des populations Bantoues qui reconnaît en son sein l’existence d’un Dieu dénommé NZAMBI MPUNGU, qui, théologiquement parlant est défini comme étant l’AUTORITE SUPRÊME ou LA CONNAISSANCE ABSOLUE. Cette CONNAISSANCE ABSOLUE à laquelle le Muuntu se tourne pour sa raison d’être et celle de son semblable à l’effet d’un mieux vivre ensemble. Celui-ci n’étant possible que par la reconnaissance tant de l’Etat que de l’Eglise des droits de Dieu et de l’Homme pour son développement INTEGRAL.
C’est dire que sans aucune reconnaissance des droits de l’Homme et du Citoyen aucune organisation étatique, aussi légale soit-elle, ne peut recourir naturellement à la légitimité populaire qui, à son tour est l’expression même d’une adhésion du peuple.
En somme, l’ETAT doit être dans une certaine mesure comme le prône le muntuïsme politique le garant des principes du droit divin qui consacre en son sein la raison même du droit naturel des personnes et de ses corollaires que sont : la justice, l’équité, le développement intégral et la paix. par Rudy MBEMBA-Dya-Bô-BENAZO-MBANZULU Source
COMMENTAIRE :
(*) Voici le Psaume 121 : 1, rien à voir avec le texte cité...
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