Et vive la liberté dans l'Islam !
Les Saoudiennes tracées électroniquement en voyage
Privées du droit de conduire et de voyager sans autorisation, les Saoudiennes sont désormais soumises à une nouvelle mesure de contrôle avec un système électronique mis en place par les autorités avertissant leur famille dès qu'elles quittent le royaume.
Depuis la semaine dernière, le «gardien» de la femme saoudienne - père, époux, frère ou tuteur - reçoit sur son téléphone un message SMS l'informant que la femme placée sous sa garde légale a franchi les frontières du royaume, même si elle voyage en sa compagnie.
C'est la militante Manal al-Chérif, icône de la campagne pour obtenir le droit des femmes à conduire qui a relayé l'information sur Twitter, après avoir été alertée par un couple.
L'époux, qui voyageait pourtant en compagnie de sa femme, a reçu un message par SMS des services de l'émigration, l'informant que son épouse «a quitté l'aéroport international de Ryad».
«Les autorités ont recours à la technologie pour surveiller les femmes», déplore la romancière et éditorialiste Badriya al-Bichr, dénonçant «l'état d'esclavage dans lequel est maintenue la femme saoudienne».
Les femmes n'ont pas le droit de quitter le royaume sans une autorisation de leur «gardien», qui peut être son propre fils pour une veuve ou une divorcée, et doivent produire à l'aéroport ou aux frontières du royaume une feuille jaune signée par ce dernier servant d'autorisation de voyager.
Cette nouvelle décision a été violemment dénoncée sur Twitter, rare bulle de liberté dans le royaume.
«Qu'ils nous passent les menottes, tant qu'ils y sont», affirme une femme.
«Il ne reste plus qu'à équiper nos femmes d'une puce électronique, pour qu'on puisse suivre tous leurs déplacements!», ironise un homme. [1]
«La technologie au service d'une mentalité arriérée»
«C'est la technologie au service d'une mentalité arriérée. Ils veulent garder les femmes prisonnières», estime e son côté Badriya al-Bichr, qui a dénoncé dans ses romans l'état de servitude des Saoudiennes, estimant que «le gouvernement ferait mieux de s'occuper des femmes soumises à la violence familiale».
Le royaume applique une interprétation rigoriste de l'islam et il s'agit du seul pays au monde où les femmes n'ont pas le droit de conduire.
Des militantes avaient lancé en juin 2011 une campagne pour braver cette interdiction, et avaient adressé une pétition au roi, mais sans obtenir gain de cause.
Le roi Abdallah, un prudent réformateur, a accordé le droit de vote aux femmes à partir des prochaines élections municipales en 2015 et allégé la pression de la terrible police religieuse, qui traque les femmes qui ne sont pas dûment voilées ou les couples non mariés.
Pour la militante libérale Souad Al-Chammari, c'est «l'establishment religieux» qui fait pression pour maintenir les restrictions sur les femmes, «traitées comme des mineures toute leur vie, même si elles occupent des postes élevés».
Elle estime qu'il ne peut y avoir de véritables réformes en Arabie saoudite sans changer le statut de la femme et lui accorder l'égalité avec les hommes.
Outre les restrictions sur leurs déplacements, les femmes sont obligées de sortir voilées, qu'elles soient Saoudiennes ou étrangères.
L'interdiction de la mixité rend en outre difficile l'accès des femmes à plusieurs métiers et cette situation fait que le taux de chômage dépasse les 30% parmi les Saoudiennes selon une étude officielle, alors que le royaume fait appel à quelque huit millions de travailleurs étrangers.
En octobre, la presse locale avait rapporté une directive du ministère de la Justice selon laquelle les avocates seraient autorisées à plaider devant les tribunaux dès le mois de novembre.
Dans cette directive, le ministère demandait aux tribunaux de permettre aux avocates, détentrices d'un diplôme en droit et ayant effectué un stage de trois ans dans un cabinet de droit, de plaider devant eux, mais cette annonce est restée lettre morte. Source
Note :
[1] Puces sous-cutanées
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Des SMS pour tenir les Saoudiennes en laisse
REPORTAGE - Lorsqu'une Saoudienne veut sortir du territoire, un message est envoyé à son «gardien mâle». Des femmes s'élèvent contre cette «humiliation».
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REPORTAGE - Lorsqu'une Saoudienne veut sortir du territoire, un message est envoyé à son «gardien mâle». Des femmes s'élèvent contre cette «humiliation».
Aziza al-Youssef se souvient du jour où un policier l'a arrêtée alors qu'elle était au volant. Un policier sympa. «C'était un quinquagénaire bienveillant. Il m'a dit: “Tu devrais conduire la nuit, ça se verrait moins”.» Aziza al-Youssef, professeur d'informatique au caractère bien trempé, en rit encore en montrant la vidéo de ses exploits postée sur You Tube. On la voit roulant tranquillement dans les rues de Riyad, la capitale saoudienne. Un acte strictement prohibé par la monarchie conservatrice, seul État au monde à appliquer cette restriction.
Aziza est l'une des organisatrices de la manif «femmes au volant» du 17 juin 2011. Plus de 80 conductrices avaient voulu marquer ainsi le 20e anniversaire de la première tentative, le 17 juin 1991. Une époque d'avant Facebook et Twitter. Cette fois les contrevenantes se sont donné le mot sur l'Internet. Chacune a pris le volant séparément, rendant la répression plus difficile. «J'ai conduit pendant plusieurs jours, raconte Aziza. Les automobilistes étaient plutôt bienveillants. Certains levaient le pouce pour me féliciter.» D'autres n'étaient pas d'accord. Aziza al-Youssef a finalement été «balancée» par trois hommes qui l'ont filmée avec leurs téléphones portables. L'histoire s'est bien terminée pour elle. «J'ai eu le temps de passer sur le siège arrière avant d'être arrêtée. Mon chauffeur, qui était avec moi, a pris le volant. Quelques instants plus tard, j'ai raconté à ce policier sympathisant que mon chauffeur pouvait être pris pour une fille sur une vidéo pas très nette. Mon chauffeur a cinquante ans et les cheveux blancs! Le policier a fait semblant de me croire et m'a laissé partir.»
Petits arrangements personnels avec la tradition
D'autres manifestantes ont été emmenées au poste quelques heures puis relâchées, le temps que leur mari vienne les chercher. Aziza al-Youssef a invité quelques-unes de ces néomilitantes à un dîner libanais dans sa villa de Riyad, la capitale saoudienne. La plupart se sont connues sur la Toile. Elles sont professeurs, publicitaires, mères de famille. Elles ont gardé leurs abayas, le manteau noir obligatoire en présence d'un homme étranger, mais le reste du règlement est diversement observé. L'une des invitées ne laisse voir que ses yeux, mais serre la main du visiteur. Les autres portent le foulard, ou ont les cheveux libres. Chaque Saoudienne bricole ainsi des arrangements personnels avec la tradition et le souci du qu'en-dira-t-on, qui pèsent sur les femmes bien plus que la religion.
Vingt ans après la première «manif au volant» leur constat est amer. Le droit des femmes à conduire reste un enjeu de pouvoir pour les religieux conservateurs, officiels ou officieux. Tahany, l'une des invitées, a écrit au roi pour démonter l'un des principaux arguments du pouvoir. Seules au volant, les Saoudiennes seraient sans défense contre les chebab, les jeunes célibataires qui draguent en bande. «J'ai dit au roi: nous sommes médecins, professeurs, mères de famille. Pourquoi devrions-nous avoir peur de nos jeunes?» s'indigne-t-elle. Le problème est aussi économique. «Je n'ai pas les moyens de payer et de loger un chauffeur, explique Racha. Il est difficile pour moi de prendre des taxis, c'est mal vu dans notre société qu'une femme attende sur le bord du trottoir. Je dois appeler des services de limousine qui coûtent cher.»
«Je dois négocier avec mon mari qui est toujours mon gardien»
La voiture n'est pas le seul sujet de conversation. On parle divorce, conditions de travail, autorisation du «gardien» mâle - mari, père, frère ou fils - pour voyager. Un nouveau système, apparemment plus moderne, est ressenti par les participantes au dîner comme une régression. «Maintenant, l'autorisation de sortie du territoire doit être demandée par les femmes sur Internet, et on présente cela comme une avancée… soupire Racha, cadre dans une société d'e-commerce. Avant, où on se présentait à l'aéroport avec une autorisation écrite, la fameuse “feuille jaune” qui a été supprimée. Maintenant, il faut d'abord cocher des cases sur un écran: “femme” ou “mineur de moins de 21 ans” autorisation “pour un seul voyage” ou “pour la durée du passeport”…»
À l'aéroport, le policier pianote sur son ordinateur et envoie automatiquement un SMS au «gardien» pour lui signaler la sortie du territoire de son épouse, fille ou mère. «Une humiliation» dit Racha. En pleine séparation, elle ne sait pas si elle pourra emmener son jeune fils en voyage, l'autorisation dépendant là aussi du seul gardien: «Je dois négocier avec mon mari, qui est toujours mon gardien jusqu'au divorce. Après, ce sera mon père…»
Les changements annoncés ont du mal à convaincre. Des femmes pourront siéger à partir de 2015 au Majlis al-Choura, le conseil législatif dont les membres sont choisis par le roi. N'est-ce pas un progrès? «Pourquoi attendre 2015? Demande Aziza al-Youssef, la maîtresse de maison. Et de toute façon c'est comme donner des marrons glacés à quelqu'un qui a faim. Je serais membre du Majlis et je ne pourrais pas prendre le volant pour m'y rendre?» par Pierre Prier
No comment...
Aziza est l'une des organisatrices de la manif «femmes au volant» du 17 juin 2011. Plus de 80 conductrices avaient voulu marquer ainsi le 20e anniversaire de la première tentative, le 17 juin 1991. Une époque d'avant Facebook et Twitter. Cette fois les contrevenantes se sont donné le mot sur l'Internet. Chacune a pris le volant séparément, rendant la répression plus difficile. «J'ai conduit pendant plusieurs jours, raconte Aziza. Les automobilistes étaient plutôt bienveillants. Certains levaient le pouce pour me féliciter.» D'autres n'étaient pas d'accord. Aziza al-Youssef a finalement été «balancée» par trois hommes qui l'ont filmée avec leurs téléphones portables. L'histoire s'est bien terminée pour elle. «J'ai eu le temps de passer sur le siège arrière avant d'être arrêtée. Mon chauffeur, qui était avec moi, a pris le volant. Quelques instants plus tard, j'ai raconté à ce policier sympathisant que mon chauffeur pouvait être pris pour une fille sur une vidéo pas très nette. Mon chauffeur a cinquante ans et les cheveux blancs! Le policier a fait semblant de me croire et m'a laissé partir.»
Petits arrangements personnels avec la tradition
D'autres manifestantes ont été emmenées au poste quelques heures puis relâchées, le temps que leur mari vienne les chercher. Aziza al-Youssef a invité quelques-unes de ces néomilitantes à un dîner libanais dans sa villa de Riyad, la capitale saoudienne. La plupart se sont connues sur la Toile. Elles sont professeurs, publicitaires, mères de famille. Elles ont gardé leurs abayas, le manteau noir obligatoire en présence d'un homme étranger, mais le reste du règlement est diversement observé. L'une des invitées ne laisse voir que ses yeux, mais serre la main du visiteur. Les autres portent le foulard, ou ont les cheveux libres. Chaque Saoudienne bricole ainsi des arrangements personnels avec la tradition et le souci du qu'en-dira-t-on, qui pèsent sur les femmes bien plus que la religion.
Vingt ans après la première «manif au volant» leur constat est amer. Le droit des femmes à conduire reste un enjeu de pouvoir pour les religieux conservateurs, officiels ou officieux. Tahany, l'une des invitées, a écrit au roi pour démonter l'un des principaux arguments du pouvoir. Seules au volant, les Saoudiennes seraient sans défense contre les chebab, les jeunes célibataires qui draguent en bande. «J'ai dit au roi: nous sommes médecins, professeurs, mères de famille. Pourquoi devrions-nous avoir peur de nos jeunes?» s'indigne-t-elle. Le problème est aussi économique. «Je n'ai pas les moyens de payer et de loger un chauffeur, explique Racha. Il est difficile pour moi de prendre des taxis, c'est mal vu dans notre société qu'une femme attende sur le bord du trottoir. Je dois appeler des services de limousine qui coûtent cher.»
«Je dois négocier avec mon mari qui est toujours mon gardien»
La voiture n'est pas le seul sujet de conversation. On parle divorce, conditions de travail, autorisation du «gardien» mâle - mari, père, frère ou fils - pour voyager. Un nouveau système, apparemment plus moderne, est ressenti par les participantes au dîner comme une régression. «Maintenant, l'autorisation de sortie du territoire doit être demandée par les femmes sur Internet, et on présente cela comme une avancée… soupire Racha, cadre dans une société d'e-commerce. Avant, où on se présentait à l'aéroport avec une autorisation écrite, la fameuse “feuille jaune” qui a été supprimée. Maintenant, il faut d'abord cocher des cases sur un écran: “femme” ou “mineur de moins de 21 ans” autorisation “pour un seul voyage” ou “pour la durée du passeport”…»
À l'aéroport, le policier pianote sur son ordinateur et envoie automatiquement un SMS au «gardien» pour lui signaler la sortie du territoire de son épouse, fille ou mère. «Une humiliation» dit Racha. En pleine séparation, elle ne sait pas si elle pourra emmener son jeune fils en voyage, l'autorisation dépendant là aussi du seul gardien: «Je dois négocier avec mon mari, qui est toujours mon gardien jusqu'au divorce. Après, ce sera mon père…»
Les changements annoncés ont du mal à convaincre. Des femmes pourront siéger à partir de 2015 au Majlis al-Choura, le conseil législatif dont les membres sont choisis par le roi. N'est-ce pas un progrès? «Pourquoi attendre 2015? Demande Aziza al-Youssef, la maîtresse de maison. Et de toute façon c'est comme donner des marrons glacés à quelqu'un qui a faim. Je serais membre du Majlis et je ne pourrais pas prendre le volant pour m'y rendre?» par Pierre Prier
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