Les réticences des religions révélées
«La science ne nous dit pas comment on va au ciel mais comment est le ciel.»
Citation attribué à Galilée.
|
On a montré au début des années 2000 que la
quantité de carbone 14 produite en haute atmosphère
avait subi des variations au cours du temps. |
Un scoop !
Depuis près de quinze jours une grande partie des médias algériens et sur Internet, nous lisons un texte à la virgule près, qui nous informe qu'un Algérien aurait remis en cause la théorie jusque-là globalement admise de la datation au carbone 14, nous lisons : «Un Algérien prouve que la datation au carbone 14 est fausse. Des Américains veulent lui décerner le prix Nobel de chimie 2012.»
Il est Algérien, il a étudié à Bab Ezzouar avant de rejoindre l'université de Harvard aux Etats-Unis en 1986. Originaire de Aïn Boucif, dans la wilaya de Médéa, Ahmed Bougatiche risque de renvoyer tous les chimistes et les anthropologues à l'école puisqu'il vient de prouver, lors d'un colloque tenu à l'université du Michigan, aux Etats-Unis, que la datation au carbone 14 est fausse.
Cela veut dire que tous les livres d'histoire et surtout de préhistoire devront être brûlés ou du moins corrigés.
Le chimiste algérien a, comme rapporté par la revue Scientific American News, parue cette semaine, prouvé devant 80 experts venus des plus grandes universités américaines et canadiennes que la datation au carbone 14 est bien fausse.
(...) A partir de l'instant où un organisme meurt, la quantité de radiocarbone qu'il contient ainsi que son activité radiologique décroissent au cours du temps selon une loi exponentielle. Un échantillon de matière organique issu de cet organisme peut donc être daté en mesurant soit le rapport 14C/C total avec un spectromètre de masse, soit son activité X années après la mort de l'organisme.»
Le chercheur algérien, plutôt le «découvreur» a trouvé une substance appelée stam 44 dans l'eau de pluie. Le chimiste, lit-on dans le texte, a prouvé par le biais de démonstrations devant les experts, que la stam 44 détruit l'effet de l'isotoope qui ne devient plus réactif. Donc, pour être explicite, un objet, une roche, un arbre ou un être humain (son squelette) ou animal peut voir sa datation faussée par les eaux de pluie, trompant ainsi les anthropologues et les chimistes.
Par exemple, un squelette mort il y a seulement quelques centaines d'années peut être daté par les spécialistes comme étant mort il y a un million si ce n'est un milliard d'années.
La conclusion du texte était en fait le message à faire passer : «Avec la découverte d'Ahmed Bougatiche, les égyptologues du monde entier devront également revoir leur copie. Aux Etats-Unis, on parle déjà de la nomination d'Ahmed Bougatiche au prix Nobel de chimie pour l'année 2012. Certains pensent même au retrait de celui obtenu en 1960 par Willard Frank Libby qui avait développé la datation au carbone 14.»
Ce texte répété en boucle sans aucune critique est invérifiable. Une recherche élémentaire sur Google uniquement indique les 10 références des journaux algériens. La revue Scientific American News a 300.000 occurrences, en tout cas elle ne décrit pas la recherche du carbone 14. Pas plus d'ailleurs que la substance, la stam 44.
Certes, l'Université de Michigan a travaillé sur les datations mais rien de spécial avec l'auteur. On peut comprendre l'embellissement des faits pour la cause noble de la défense de la religion. Nous allons dans ce qui suit donner l'exemple du suaire de Turin qui a défrayé la chronique dans les années 1980 et montrer qu'en définitive l'enchantement, voire le merveilleux a ses limites devant les faits scientifiques indéniables.
La controverse de la datation au carbone 14 et le suaire de Turin
Le Suaire de Turin, ou «Saint-Suaire», est apparu en France en 1357, à Lirey, propriété de la famille de Charny, qui en fait ostension jusqu'en 1360, année où l'évêque de Troyes, Henri de Poitiers, interdit ces ostensions, considérant que le linceul est un faux. La nuit du 3-4 décembre 1532, le suaire fut pris dans un incendie à la Sainte-Chapelle de Chambéry.
On le retira du feu au moment où le coffre d'argent dans lequel il reposait commençait à fondre. Le linceul alors plié en 48 épaisseurs, fut brûlé à certains endroits. Là où le tissu était troué, les soeurs de l'Ordre des Clarisses, en 1534, reprisèrent des pièces d'aspect plus ou moins triangulaires (en blanc sur les photos positives, en noir sur les négatives). En 1578, il est transféré dans la cathédrale de Turin, d'où son nom.
En 1983, le roi Humbert II d'Italie en fait don au pape Jean-Paul II. L'idée de dater scientifiquement le suaire avait d'abord été proposée, dans les années 1960.
Le développement dans les années 1970 de nouvelles techniques pour la radio-datation au carbone, qui a nécessité des quantités plus faibles de matières de source, a incité l'Eglise catholique pour fonder le Saint-Suaire de Turin Research Project (S.Tu.RP), qui portait sur environ 30 scientifiques des diverses confessions religieuses, y compris les athées. Une commission dirigée par le chimiste Robert H. Dinegar et le physicien Harry E. Gove a consulté de nombreux laboratoires qui ont pu à l'époque (1982) prendre des échantillons de tissu de petites tailles.
En 1988, cette analyse fut confiée à trois laboratoires neutres: l'Université d'Oxford, l'Institut Polytechnique de Zurich et l'Université d'Arizona à Tucson (Etats-Unis), les nouvelles techniques permettant de n'en prendre que des fils de quelques centimètres. (1)
Le 28 septembre 1988, le British Museum et le coordonnateur de l'étude, Michael Tite, communiquent les résultats officiels pour le diocèse de Turin et au Saint-Siège. Dans une conférence de presse très courue le 13 octobre, le cardinal Ballastrero annoncait les résultats officiels, c'est-à-dire que la radio-carbone des tests en date du linceul à une date de 1260-1390 après J.-C., avec confiance de 95%. Le rapport officiel et complet sur l'expérience a été publié dans la revue Nature. [49] Les dates non calibrées de chacun des laboratoires, avec 1-sigma erreurs (68% de confiance), étaient comme suit: Tucson: 646 ± 31 ans; Oxford: 750 ± 30 ans, Zurich: 676 ± 24 ans la moyenne pondérée était 689 ± 16 ans, ce qui correspond à l'âge calibré de CE 1273-1288 avec confiance de 68%, et CE 1262-1384 avec confiance de 95%. Comme indiqué dans la revue Nature, le professeur Bray, de l'Instituto di G. Metrologia 'Colonetti, Turin, « a confirmé que les résultats des trois laboratoires étaient compatibles entre eux, et que, sur la preuve présentée, aucun des résultats moyens n'était douteux.» (2)
Les trois laboratoires rendirent donc un verdict identique: le linceul fut fabriqué entre 1260 et 1390. Le doute n'était selon eux plus possible: le Saint-Suaire est un faux fabriqué au Moyen-Âge, d'autant plus que le visage d'un mort ne peut laisser de telles traces sur le suaire. Il n'avait donc jamais pu servir à conserver le corps de Jésus. Les résultats furent rendus publics par l'archevêque de Turin qui s'inclina devant le verdict sans appel de la Science. L'histoire ne s'arrête pas là, il y eut des critiques de certains autres scientifiques. En 1993, le Dr A. Leoncio Garza-Valdes a découvert la présence de polyhydroxyalcanoate (mcl-PHA)-produire des bactéries Leobacillus rubrus sur le tissu du Suaire. Selon Garza-Valdes, «les scientifiques qui ont effectué la datation au radio-carbone du Suaire de Turin en 1988, n'étaient pas au courant de la présence de ce contaminant insoupçonnée (naturel revêtement plastique)». (2)
Dans une publication en 2008 (lit. «Le Saint-Suaire, en comparant les éléments de preuve») de David Rolfe a suggéré que la quantité de carbone 14 trouvée sur la toile peut avoir été significativement affectée par la météo, les méthodes de conservation employées tout au long des siècles, ainsi que le carbone volatil dégagé par l'incendie a endommagé l'echantillon (...) Certains chercheurs ont également suggéré que, parce que le tissu a été manipulé sans précaution pendant des siècles, la contamination externe est pratiquement garantie, et que la fumée de bougie (riche en dioxyde de carbone) augmente la volatilité des molécules de carbone produites durant les deux feux et qui pourraient avoir modifié la teneur en carbone de la toile, ce qui rend peu fiable le carbone comme un outil de datation. (2)
Des partisans de l'authenticité du Suaire pensent néanmoins que la datation au carbone 14 a été faussée. En effet, lors de l'incendie de 1532, les proportions de carbone ont pu être modifiées par absorption de carbone par le Suaire en raison de la combustion. De plus, la restauration du Suaire par les Clarisses a introduit sur le Suaire des fils de l'époque de cette restauration. La marge d'erreur (ici, entre 142 et 272 ans) est alors plausible.
Les arguments contre la méthode au carbone 14
De nombreux arguments bibliques, scientifiques et historiques ont été échangés, mais il semble impossible de prouver que les partisans du Suaire seraient simplement des croyants fervents, ni même le contraire. Cette méthode de datation rencontre une controverse, car elle comprend des limites. Elle repose en effet sur deux hypothèses fondamentales : la première stipule que la teneur en 14C des matières carbonées actuelles est très proche de celle des matières carbonées qui vivaient autrefois. Ce qui n'est pas le cas!
En effet, les chercheurs savent maintenant qu'il existe des fluctuations de teneur en 14C dans l'atmosphère à l'échelle du millénaire et même de la décennie. Il convient alors d'apporter un certain nombre de corrections aux dates brutes trouvées. La seconde suppose que la répartition du 14C est homogène dans l'atmosphère. Ainsi, tout organisme présente de son vivant la même radioactivité que le gaz carbonique atmosphérique. A sa mort, les échanges gazeux cessent et le 14C n'est plus renouvelé. Sa radioactivité diminue alors progressivement, à raison de la moitié tous les 5730 ans.
Mais encore une fois, cette seconde hypothèse, tout comme la première, est fausse. En fait, les concentrations océanique et atmosphérique en carbone radioactif ne sont pas homogènes. On a montré au début des années 2000 que la quantité de carbone 14 produite en haute atmosphère avait subi des variations au cours du temps, liées aux variations du champ magnétique terrestre. Les datations des échantillons marins doivent donc être, elles aussi, corrigées. (2)
Par ailleurs, on pense que la quantité de rayons cosmiques qui pénètrent l'atmosphère terrestre affecte la quantité de 14 C produites et donc datant du système. La quantité de rayons cosmiques atteignant la Terre varie avec
l'activité du Soleil, et avec le passage de la Terre à travers les nuages magnétiques que le système solaire se déplace autour de la galaxie, la Voie Lactée. La force du champ magnétique de la Terre affecte la quantité de rayons cosmiques dans l'atmosphère. Un champ magnétique plus fort dévie les rayons cosmiques plus loin de la Terre. Dans l'ensemble, l'énergie du champ magnétique de la Terre a diminué, donc plus 14 est en cours de production que par le passé. Cela rendra les échantillons plus vieux qu'ils ne sont vraiment.» (
3)
Le problème de la datation du Déluge
Dans les trois religions, le Déluge occupe une place importante, il est daté dans la Bible et les Evangiles. Les données de la science de la géologie et de l'anthropologie sont en contradiction avec le récit biblique. Le plus ancien récit que nous avons est «L'an 600 de la vie de Noé, au second mois, le dix-septième jour du mois, en ce jour-là, toutes les fontaines du grand abîme se rompirent, et les écluses des cieux s'ouvrirent. Et le déluge fut sur la Terre 40 jours, et toutes les montagnes qui étaient sous tous les cieux furent couvertes.» (Genèse 7 versets 11, 17 et19).
Au total, 13 récits du Déluge sont arrivés jusqu'à nous. Il existe dans le monde de nombreux récits de déluge, par exemple chez les Incas, en Amérique du Sud, chez les Delawares, Indiens de l'est de l'Amérique du Nord. Plusieurs mythes indiens relatent les mêmes faits. Origines sumériennes. Dans cette version, Noé se nomme Ziousoudra. L'homme est devenu orgueilleux et pense qu'il est l'égal des dieux. Dans le Coran, dernier Livre révélé, le Déluge est dans ses grandes lignes décrit comme dans la Bible. Il apparaît dans plusieurs sourates: Sourate 71, de Nouh (Noé), sourate 29. Al-Ankabut, (L'araignée), sourate 26. As-Shuaraa, sourate 11 de Hud, sourate 17 Al-Isra. Dans la sourate 29. Al-Ankabut, (L'araignée). On lit verset 14. Et en effet: «Nous avons envoyé Noé vers son peuple. Il demeura parmi eux mille ans moins cinquante années. Puis le déluge les emporta alors qu'ils étaient injustes.» Verset 15. «Puis Nous les sauvâmes, lui et les gens de l'arche; et Nous en fîmes un avertissement pour l'univers.» L'eau baissa, l'ordre fut exécuté, et l'arche s'installa sur le Joudi [...] 48. Il fut dit: «Noé, débarque avec Notre sécurité et Nos bénédictions sur toi et sur des communautés [issues] de ceux qui sont avec toi. Et il y (en) aura des communautés auxquelles Nous accorderons une jouissance temporaire; puis un châtiment douloureux venant de Nous les touchera.»
Pour la science, les datations au carbone font remonter une partie du cataclysme à au moins 7500 ans (5). Ce qui signifie que la tradition orale dut conserver ces événements pendant au moins 2500 ans. Comment? Le mystère reste entier.(4)
Pour coller à la science, certains scientifiques pensent que le déluge de la Genèse aurait grandement perturbé l'équilibre du carbone. La crue a enterré une énorme quantité de carbone, qui est devenue le charbon, le pétrole, etc, en abaissant le total du C 12 dans la biosphère (y compris dans les plantes. Après le déluge, le CO2 absorbé, n'est pas remplacé par la désintégration de la végétation enterrée. Par conséquent, le 14 C / 12C dans les plantes / animaux / l'atmosphère d'avant le déluge devait être inférieur à ce qu'il est aujourd'hui. Les chercheurs créationnistes ont suggéré que les dates de 35.000, -. 45.000 ans devraient être re-calibrées à la date biblique du déluge.
En résumé, le carbone-14, méthode, une fois corrigé des effets de l'inondation, peut donner des résultats utiles, mais elle doit être appliquée avec soin. Il ne donne pas les dates admises (millions d'années). Ces dates corrigées s'adaptent correctement avec le déluge biblique. La datation au radio-carbone ne se veut pas une méthode miracle. Et si elle demeure la technique la plus employée, d'autres méthodes peuvent la compléter».(3)
Cependant, la découverte sensationnelle énoncée en préambule - que nous n'avons trouvée nulle part, fait que ce scoop risque de discréditer ce qui reste de sérieux d'une Université algérienne bien mal en point. Nous serons naturellement les premiers à nous en réjouir si nous avons les preuves de cette révolution, car c'en est une et nous nous étonnons que les religions ne s'en sont pas emparé.
Il est vrai que de temps à autre chaque religion fait preuve de concordisme et tente de coller à la science. C'est une erreur, la science peut être remise en cause tandis que les fondamentaux du Divin, non! Il ne faut pas qu'il y ait indexation.
Notes :
4. C.E.Chitour: Le déluge entre mythologie et religions révélées. Un défi pour la science L'Expression 04 Octobre 2007
5.
L'âge de la terre
Source
Pour comparaison, lire aussi : Création vs Évolution, 101 preuves