Religion et laïcité, le flou élyséen
A quelques jours de la manifestation des opposants au "mariage pour tous", dimanche 13 janvier, François Hollande a joué la carte de l'apaisement. En échangeant des voeux avec les responsables des principales religions, mardi 8 janvier, le président de la République s'est porté garant d'une "écoute pleine et attentive à toutes les confessions et convictions". Alors qu'on assistait à une escalade verbale entre l'Eglise catholique et la gauche sur le mariage gay, il a jugé que l'idée de "ressusciter une guerre scolaire n'a aucun sens", tout en soulignant que ce projet qui suscite l'opposition de toutes les religions monothéistes "irait à son terme".
Depuis sept mois, le pouvoir a commis bien des maladresses à l'égard des religions, comme si sa conception de la laïcité devait le conduire à les tenir à l'écart du débat public. Cécile Duflot partant en guerre contre l'Eglise catholique pour qu'elle mette à disposition des sans-abri ses bâtiments vides, c'était une faute. Faire auditionner ensemble sur le mariage homosexuel les religions à l'Assemblée nationale – au point, selon la formule de Gilles Bernheim, le grand rabbin de France, de donner "l'impression d'une coalition des religieux contre un parti politique" –, c'était une erreur. Du côté des catholiques, il y a eu aussi moult dérapages.
M. Hollande a eu raison de tenir un langage d'apaisement et de fermeté. La laïcité exige respect et écoute des différentes religions. Elles ont leur place dans le débat public, mais elles ne sauraient imposer leur loi à la société.
Le 20 décembre 2007, en recevant le titre de chanoine honoraire du Latran, Nicolas Sarkozy avait assuré que "la laïcité n'a pas le pouvoir de couper la France de ses racines chrétiennes". Et il avait choqué en ajoutant que, "dans l'apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur".
Le chef de l'Etat n'ira pas recevoir le titre de chanoine du Latran, qu'il a accepté, mais cela ne le dispense pas de livrer sa philosophie sur la laïcité. Durant sa campagne, M. Hollande avait proposé – engagement no 46 – d'"inscrire les principes fondamentaux de la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution ", sous réserve des règles particulières applicables en Alsace et en Moselle. Cette promesse semble bien être tombée dans les limbes. Tout se passe comme si, depuis la guerre scolaire de 1984 qui avait entraîné des manifestations si puissantes qu'elles avaient contribué à la démission de Pierre Mauroy, la gauche était tétanisée sur la laïcité. En voulant inscrire la loi de 1905 dans la Constitution, M. Hollande fermait la porte à toute actualisation. Mais Manuel Valls, son ministre de l'intérieur chargé des cultes, s'est prononcé, en 2005, pour un toilettage de la loi sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat.
A défaut d'aller au bout de son engagement de campagne, M. Hollande ferait bien de clarifier sa conception de la laïcité. Le 8 janvier, il a manqué l'occasion. Source
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