La religion s'invite dans la campagne politique
Slogan mentionnant la foi, citation d'évangile dans un communiqué, voix divine entendue par un candidat: la religion a pris une place toute particulière dans la campagne pour les élections territoriales de la très chrétienne Polynésie française, qui s'achève samedi soir.
L'autonomiste Gaston Flosse, grand favori de ces élections avec 40,16% des voix obtenues au premier tour, a choisi comme slogan "la FOI de reconstruire ensemble", avec le mot foi écrit en majuscule, en gras ou en couleur, selon les affiches ou les tracts.
Ce choix est loin d'être anodin en Polynésie française où le poids de la religion dans la société est important. Selon un sondage datant de 2000 concernant les affiliations religieuses, seuls 4,5% des sondés se disaient sans religion.
Près de 40% se revendiquaient de l'Eglise catholique et la même proportion de l'Eglise protestante ma'ohi (polynésienne). Mormons, adventistes du 7e jour, mormons sanitos, Témoins de Jéhovah et d'autres "petites Eglises" dissidentes se partagent près de 20% d'adeptes.
Dans un pays majoritairement protestant, donc, les principaux leaders politiques sont pourtant catholiques comme Gaston Flosse et son adversaire historique Oscar Temaru.
Ce dernier, indépendantiste, n'est pas en reste dans l'utilisation des symboles religieux : la croix est l'un des symboles de son parti, et sa devise est "Dieu est mon sauveur".
L'actuel vice-président de la Polynésie française, Antony Géros, avait suscité une polémique en 2004, en accrochant une croix à l'Assemblée de la Polynésie française, alors qu'il venait d'en être élu président. Il l'avait retirée quelques jours plus tard.
"Pour mesurer la présence de la religion dans les cultures politiques polynésiennes", le docteur en science politique de l'université de Papeete, Sémir Al Wardi, recommande d'assister aux réunions publiques: "en début de chaque réunion de nature politique, associative, sportive ou autre, est prononcée une prière".
Chaque meeting des trois candidats encore en lice pour le second tour de dimanche n'a pas dérogé à cette règle non écrite mais profondément inscrite dans une culture traditionnellement orale.
L'UPLD d'Oscar Temaru a franchi lundi une nouvelle étape dans le mélange des genres, en citant l'évangéliste Saint Matthieu dans un communiqué, où Gaston Flosse est comparé au "diable", au "tentateur" et au "serpent".
"Par trois fois, le démon a tenté Jésus. Par trois fois, Jésus le repoussa", poursuit l'UPLD, en concluant que le peuple polynésien doit, de la même manière "repousser" le Tahoeraa, parti de Gaston Flosse, au moment de glisser son bulletin dans l'urne dimanche.
L'entre-deux-tours a aussi été animé par des "voix du ciel" entendues par un candidat éliminé au premier tour. Franck Falletta avait réuni 3,1% des suffrages et avait d'abord souhaité reporter ses voix sur la liste de Gaston Flosse, avant de se raviser : "Il y a eu une révélation qui s'est faite, et j'ai trouvé que Teva Rohfritsch a les mêmes convictions que moi", avait-il affirmé devant la presse pour expliquer son soutien au troisième homme de la triangulaire.
Autre acteur de la campagne territoriale, bien que non candidat : le roi Pakumotu. Ce monarque autoproclamé revendique son titre de droit divin, il porte une couronne, un sceptre et une toge. Accompagné de ses "ministres" et de ses gardes du corps, il s'est présenté à plusieurs reprises devant l'Assemblée de la Polynésie française, qu'il considère comme sa propriété. par Mike Leyral Source
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